1965 Lumière de l’Arctique : La Dernière Migration tome 2. Arthaud Grenoble.
La Dernière Migration
Roman (tome 2)
« Jour et nuit n’avaient aucun sens ! Le temps coulait d’éternité, on marchait au rythme des rennes et quand ceux-ci, d’instinct s’arrêtaient pour ruminer, la cita faisait une courte
halte, qu’il fasse nuit ou qu’il fasse jour et, sans prendre la peine de monter les tentes, les femmes allumaient un grand feu, dressaient le trépied et faisaient fondre la neige pour le bouillon de renne ; les traîneaux étaient formés en carré autour de la flamme et chacun mangeait à sa guise des morceaux de viande qu’il faisait griller à la pointe du couteau sur les braises. Puis ceux qui n’étaient pas de garde s’enroulaient dans leurs fourrures et dormaient sur place, la figure cachée sous le bonnet rouge. »
La grande migration annuelle est proche pour le peuple lapon. Mais sa liberté et ses traditions sont en danger depuis qu’un territoire limité lui est attribué. Ce grand voyage, où les différents clans se réunissent mais s’affrontent aussi, pourrait bien être le dernier.

« Les chiens trottent museau sur la neige. Ils ne s’arrêtent pas. Ils ne s’arrêtent jamais !Tabatiak et Tatigat, assis à l’avant des traîneaux, fixent leurs regards vers l’est, poussant parfois de petits cris d’encouragement : Oe ! Oe ! Giuseppi s’étale sur la peau d’ours, les yeux clos il dort comme un ange sans souci du chaos, du paysage, du froid. Cette terre inhumaine c’est celle de sa race ! Il faut des millénaires d’acclimatation et d’adaptation pour y vivre. »
Frison-Roche raconte son voyage dans le Grand Nord canadien. Accompagné de Pierre Tairraz – dont les photos illustrent le livre- il a vécu des mois durant dans ce territoire plus vaste que l’Europe et tout entier voué à la forêt, aux déserts glacés, à la banquise. C’est là -au long de 2000km en traîneau à chiens- qu’il a partagé l’existence des Indiens et des Eskimos, chassant avec eux le caribou et l’ours, le bœuf musqué et le phoque.
Frison-Roche a saisi ici, les derniers rites, les derniers gestes de ce qui fut durant des millénaires, la vie primitive de l’homme.

« Le froid était si vif que les hommes, pour se réchauffer, sautillaient, tournaient sur place comme des toupies. Les heures coulaient si lentement que la marche du temps devenait celle de l’éternité. Pourtant il fallait tenir, veiller, épier la nuit d’où viendrait soit le salut, soit le danger. »

